À quoi ressemblent les Scop aujourd'hui en France ?
Un nouveau regard sur les sociétés coopératives grâce à la thèse en sciences économiques de Thibault Mirabel.
Adapté d'un fil publié sur Twitter le 6 novembre 2022.
À quoi ressemblent les Scop (sociétés coopératives) aujourd'hui en France ?
Un article d'Alternatives Economiques parcourt la thèse de Thibault Mirabel. Grâce à des méthodes économétriques, ce dernier donne à voir les Scop au-delà des clichés.
Thibault Mirabel rappelle d'abord les caractéristiques distinctives des Scop, telles que :
- 👉 Statut légal spécifique. En France, il est régi par exemple par la loi de 1947 sur le statut de la coopération et la loi de 1978 sur le statut des coopératives ouvrières de production. Une Scop peut prendre la forme d'une SARL, d'une SAS ou d'une SA ;
- 👉 Sociétés détenues par les travailleurs : les sociétaires doivent détenir au moins 51% du capital social ;
- 👉 Gouvernance démocratique : les votes en Assemblée générale se font selon le principe démocratique "1 personne = 1 voix". Cela s'oppose au principe "1 action = 1 voix" dans les assemblées générales d'actionnaires au sein d'entreprises que Mirabel nomme "conventionnelles" (mais que je dois qualifier de ploutocrates et autoritaires) ;
- 👉 Règles spécifiques de distribution des bénéfices : au moins 15% pour l'investissement, au moins 25% pour les travailleurs, une part pour les dividendes dus aux sociétaires, le reste en réserve.
On apprend ensuite que…
👉 Les Scop se concentrent aujourd'hui dans des secteurs à "coûts irrécupérables" faibles ou modérés.
- Industrie légère : BTP, imprimerie, édition, industrie manufacturière…
- Services : surtout dans les services "à forte intensité de connaissance et les hautes technologies" 3/
👉 La majorité des Scop sont créées "ex nihilo".
Autrement dit, la "reprise en Scop", très médiatisée, est plutôt un lieu commun. La Scop n'est pas le modèle de la dernière chance !
👉 Les Scop sont aussi productives que les "entreprises conventionnelles".
En tout cas, Mirabel ne relève pas de différence statistiquement significative dans la littérature.
En effet, la gouvernance démocratique permet un meilleur partage de l'information, bien qu'elle induise des coûts organisationnels à mesure que la taille de la Scop augmente.
👉 Les Scop survivent mieux que les "entreprises conventionnelles".
En effet, en cas de choc de la demande (exemple : pandémie de type Covid-19), les salariés des Scop ont tendance à préserver les emplois en réduisant les salaires. À l'inverse, les "entreprises conventionnelles" réduisent les emplois. Dans une Scop, le fait de garder le collectif de travail intact facilite la reprise et donc l'absorption du choc.
Alors, travailler dans une Scop : un facteur de résilience face aux crises systémiques à venir ?
Références :
- Performance and rarity of worker-owned firms : empirical evidence from France (theses.fr), Thibault Mirabel, thèse soutenue le 23 mai 2022.
- "Coopérer. Les Scop et la fabrique de l'intérêt collectif", Anne-Catherine Wagner, CNRS Editions, 2022.